Hasard ou coïncidence… mes premières lectures de cette année sont assez féministes ! Pas tout à fait le hasard, en fait, parce que d’abord, c’est une tendance forte en librairie, et aussi parce que ces livres m’ont été recommandés par des amies…

Féministe, moi ? Peut-être… il faut dire que j’ai exercé plusieurs métiers, mais en commençant par des études scientifiques (avec beaucoup de garçons) et des métiers « dits masculins » – avec leur lot de réflexions de collègues du type « normalement, les filles ne font pas d’informatique… mais toi, c’est pas pareil » – euh… mais que voulait-il dire par là ??? En même temps, avec aussi beaucoup de camaraderie, d’entraide, de belles rencontres et beaucoup de témoignages du type « j’étais contre les femmes dans l’armée mais elles m’ont fait changer d’avis » (oui, ma vie est un roman…).

Bref, c’est un sujet qui m’a toujours beaucoup intéressée…

Il n’est donc pas surprenant que l’une de mes copines bibliothécaires (un monde avec beaucoup de filles, pour le coup) m’ait conseillé Les Grandes Oubliées, pourquoi l’Histoire a effacé les femmes.

Je l’ai lu… deux fois (on ne se moque pas de mon cerveau défaillant le soir, qui ne me faisait confondre toutes les époques après la première lecture… alors que ce livre se lit comme un roman !). Et ce livre est plein de choses complètement passionnantes.

Titiou Lecoq nous entraîne ainsi depuis la préhistoire et jusqu’à aujourd’hui, pour découvrir l’Histoire côté femmes. Et découvrir en quoi notre vision de l’Histoire est empreinte de stéréotypes, de réécritures…

Par exemple, vous avez déjà entendu, vous aussi, des « experts » expliquer que les femmes n’ont pas le sens de l’orientation, contrairement aux hommes, parce qu’elles restaient dans la grotte pendant la préhistoire ? … j’ai lu ça dans Les hommes viennent de Mars, et j’avoue que ça m’avait pas mal agacée – du coup, j’en étais restée là de ma lecture. Eh bien, cette histoire de femme qui reste dans sa grotte, c’est n’importe quoi (en même temps, on se demande ce qu’elle y aurait fait, toute la journée… le ménage et la poussière ?). Non seulement les femmes faisaient des kilomètres pour la cueillette, mais elles participaient aussi à la chasse – pas partout de la même manière parce que, autre stéréotype qui tombe, il n’y a pas eu une culture partout dans le monde durant toute la préhistoire…

Autre exemple, le Moyen-Âge. On découvre que les femmes y faisaient tous les métiers, et qu’il y avait donc des mots pour ces métiers, comme le mot autrice – moi qui croyais que c’était un néologisme, auquel j’étais un peu allergique… Titiou Lecoq m’a réconcilié avec ce mot.

On découvre surtout que l’Histoire des femmes n’a pas été linéaire… des périodes « de renfermement » succèdent aux périodes « d’ouverture », et le modèle qu’on a tous en tête comme existant depuis la nuit des temps (un partage des tâches où l’homme travaille à l’extérieur et la femme assume les tâches domestiques et l’éducation des enfants) ne date en fait que du XIXème siècle.

Et c’est au XIXème siècle qu’on commence à étudier la préhistoire, en y projetant sa vision du monde… d’où la femme qui fait le ménage dans la grotte (la boucle est bouclée 😉 ).

J’ai tout de même une réserve. Comme dans beaucoup de livres sur le sujet, l’autrice (oui oui, mot adopté !) regarde tout à travers le prisme de la place des hommes et des femmes – un prisme qui ne rend pas toujours compte de la complexité du monde. Qu’un couple fasse une déclaration d’impôt commune, j’ai toujours vécu ça comme le fait de faire partie d’une équipe, pas comme une discrimination (si le salaire de la femme est souvent inférieur à celui de son mari, les dépenses sont assumées en commun aussi…). On pourrait s’interroger sur l’existence et la reconnaissance de chacun dans la famille… mais ça demande un autre prisme. 😉

Même si je n’étais pas d’accord avec tout, c’est un livre qui fait se poser des questions, qui remet en cause des acquis… un livre très bien écrit, plein d’humour, où les chapitres s’enchaînent, qui assume son côté militant. Une bonne manière de commencer l’année !