Catégorie : Romans jeunesse (Page 1 of 2)

La reine sous la neige – François Place

C’est une histoire farfelue et tendre, follement originale… Une histoire impossible à résumer, aussi. D’ailleurs, François Place y a renoncé. On peut ainsi lire en quatrième de couverture :

Une tempête en plein ciel,
un avion dérouté,
un vol de portable,
un coup de foudre,
deux amoureux,
une reine morte,
un enfant perdu,
un tigre évadé du zoo,
une statuette de plastique,
une enquête impossible,
Londres sous la neige…

Ce qui est rigoureusement exact, et qui donne plutôt une bonne idée de l’ensemble… mais qui ne dit pas grand chose non plus.

Essayons, quand même…

Il est question, donc, de la reine. Pas n’importe quelle reine : la reine d’Angleterre. Elisabeth II, mine de rien (ou pas), va jouer un rôle essentiel dans cette histoire, sans qu’on entre jamais dans les couloirs du palais de Buckingham.

Mais cela commence dans un avion, parti d’Afrique du Sud pour rejoindre les Pays-Bas. Tempête de neige sur Amsterdam, sur toute l’Europe du Nord en fait, et l’avion est dérouté sur Londres. À son bord, Sam, une jeune fille de 18 ans qui traîne un sac à dos et quelques souvenirs douloureux, et qui se retrouve soudain un peu perdue, dans cette ville où elle ne connaît personne. Enfin, presque personne (et ça, vous le découvrirez en lisant l’histoire).

Au fil des pages, des inconnus vont lui tendre la main, et elle va tendre la main à des inconnus. Les choses vont dérailler et trouver des solutions inattendues. Et nous, lecteurs, nous allons faire connaissance avec une foule de personnages, originaux et attachants, dont les destins se croisent…

C’est farfelu et original, donc, créatif, un peu comme un conte de Noël zarbi qui se passerait au mois d’avril… En fait, ça ne ressemble à rien de connu, et c’est ça aussi qui est chouette.

J’ai passé un excellent moment à traverser ce livre, un peu déroutée au début – un roman ado, j’avais tendance à rechercher des codes… tout est allé mieux quand j’ai compris qu’il n’y en avait pas ! Je me suis parfois un peu perdue dans le fil des personnages – ne faites pas comme moi, ne plongez pas dedans à point d’heure après avoir enfin bouclé toutes vos tâches en retard, avec les yeux qui se ferment tout seuls !

J’ai fini le livre séduite par la brillante manière dont l’auteur clôt le roman en rejoignant tous les fils qu’il a tissés… d’une façon, elle aussi, follement originale (parce que, avouons-le, c’était un peu « casse-figure » cette histoire !).

Et je l’ai refermé avec la furieuse et étrange envie de décorer notre cheminée d’une petite reine en plastique qui salue de la main… le truc ultra-kitch, qui ne me ressemble pas du tout… ne dites rien à ma famille, svp…

Violette Hurlevent et le Jardin Sauvage – Paul Martin, J-B Bourgeois

Il y a des livres magiques. Violette Hurlevent en fait partie.

C’est un livre qui a la magie de l’enfance, celle des « on dirait que je serais… » et des grandes aventures à la recherche d’un caillou qui parle, un bâton à la main, un gros chien en guise de monture…

La magie des illustrations aussi… Elles sont magnifiques : chaque page est une petite merveille de détails, de poésie, de composition… jamais aucune routine, on alterne entre des doubles-pages, des marges qui mangent le texte, de beaux dessins en regard d’une page pleine de texte, une branche qui traverse les deux pages…

Magie de l’histoire surtout, qui mêle le rêve et la réalité, le conte et les drames de la vie…

Mais commençons par le commencement. Le tout début de l’histoire…

Au tout début de l’histoire, Violette vient d’emménager dans la vieille maison de sa famille, avec sa maman et son petit frère. Cette maison, elle ne l’aime pas, son jardin en pagaille non plus. Et puis, elle en veut à tout le monde, surtout à son père sans doute, à cause de qui ils ont dû s’enfuir tous les trois. Un père qui lui fait très peur, et qui surgit tout à coup, alors qu’on pensait qu’il avait perdu leur trace.

Alors, elle plonge dans le jardin…

Mais non, au tout début de l’histoire, en fait, juste avant ce chapitre-là, il y a le jardin qui se réveille d’un très long sommeil. Quelqu’un arrive… quelqu’un qui va ramener la vie, qui va tout changer et peut-être, les préserver du désastre qui se prépare…

Et les deux histoires se tissent ensemble. Les aventures de Violette dans ce jardin peuplé de créatures extraordinaires, un jardin qui semble ne pas avoir de fin, où les herbes mouvantes forment un océan, où les taupes donnent des conseils, où les jardiniens veillent sur les prairies et où rôdent les loups…

Et puis, la vie au dehors, les secrets de famille cachés dans une boîte de photos, la nécessité de faire face, les peurs qui s’incrustent et la possibilité de se libérer du mal qu’on pu nous faire…

Le lecteur adulte va voir tout ça. L’enfant, peut-être pas, ou alors à sa manière, subtile, profonde, qui comprend que l’imaginaire et la réalité ne sont jamais loin l’un de l’autre…

C’est un très beau livre, à offrir à un enfant, à lui lire, ou à lire pour soi…

Un beau livre aussi par son format, son beau papier, la couverture au carton texturé, rehaussé de dorures et de touches de couleur…

Le tome 2 (suite et fin de celui-ci) vient de sortir, mais le tome 1 pourrait presque s’achever comme ça, sur une fin ouverte à tous les imaginaires…

Un beau livre à conseiller à l’approche de Noël, vraiment…

Pour les enfants – l’éditeur conseille à partir de 10 ans, c’est un gros livre donc pour les bons lecteurs… mais très accessible à mon avis plus jeune, si on aime se plonger dans des gros livres…

Mais sans en priver tous les adultes qui ont gardé une âme d’enfant et l’amour des contes, des arbres et de la magie cachée au creux des jardins sauvages…

Lectures d’été

Deux livres très différents dont j’ai envie de vous parler… Leurs points communs ? Ils étaient dans mon sac pour les vacances. 😉

***

Vango, de Timothée de Fombelle : un grand (et gros) roman d’aventure, avec du mystère, des rebondissements, de beaux personnages… Il est écrit par Timothée de Fombelle et il n’y a pas besoin d’en dire plus : on sait qu’on va être embarqué, ému, dépaysé, qu’il y aura du sens, du suspens, de l’espoir…

On y découvre Vango, orphelin au passé mystérieux, échoué un jour sur une plage sur une île de Sicile, accompagné par une femme qui a tout oublié sauf qu’elle est sa nourrice, et qui parle l’italien, le français, l’anglais, le russe ou le grec… aucun indice sur leur pays d’origine, aucun indice tout court à part un mouchoir brodé…

On est à la fin des années 30, on fait le tour du monde en dirigeable, les uniformes nazis envahissent l’Allemagne, les jeunes femmes conduisent des voitures à toute allure sur les routes d’Écosse, quelques amis rêvent de maintenir la paix malgré tout… et Vango est poursuivi par des personnages mystérieux, qui veulent sa mort sans qu’il puisse comprendre pourquoi…

Ce premier tome s’arrête sur quelques révélations et encore plus de suspens.

Il a été dévoré très rapidement par mes deux miss de 16 et 13 ans, et leur frère de 11 ans va forcément adorer aussi ! Moi, je l’ai lu tout aussi vite mais je fais une pause entre les tomes – après avoir vérifié que le tome 2 commence par un petit résumé… idéal pour moi qui ne peut (presque) jamais enchaîner les tomes d’une même série.

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Kill the Indian in the child, d’Élise Fontenaille : un roman très court, percutant, sur un sujet très dur, inspiré d’une histoire vraie.

Au Canada, jusqu’au milieu des années 90, les jeunes indiens étaient obligés d’aller dans des pensionnats destinés à les « rééduquer », faire disparaître tout ce qui était indien en eux pour en faire de « vrais occidentaux ». J’avais déjà entendu parler de ces pensionnats, et des dégâts terribles qu’ils ont pu faire, créant des générations de déracinés, n’appartenant vraiment à aucun monde, sans repères… Je n’avais pas conscience par contre des sévices terribles qui avaient pu être commis dans ces établissements tenus par des religieux. Le livre nous les fait découvrir, aux côtés du jeune Mukwa (mais pas question de l’appeler comme ça, là-bas, ce sera « numéro 15 »). Et même si certaines choses sont suggérées, c’est très (très) dur…

C’est très bien écrit. La forêt, la vie sauvage, les murs du pensionnat, l’hypocrisie des uns, le sadisme des autres… On est plongé dedans, sans filtre. En même temps, une touche de fantastique vient transfigurer l’histoire, la rendre plus supportable et l’emmener sur un autre registre…

On en sort bouleversé et un peu sonné.

Un beau livre, à réserver aux adultes et aux ados les plus grands : ma miss de 16 ans l’a beaucoup aimé, mais je ne suis pas sûre de le proposer à sa sœur de 13 ans tout de suite… Même si elle a déjà entendu parler de sujets tout aussi difficiles, c’est autre chose de les lire décrits par des yeux d’enfant…

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Les lectures de vacances ne sont pas finies… je vais pouvoir aller reremplir mon sac ! 🙂

Lotta sait tout faire – Astrid Lindgren

Charmant. Adorable… avec une petite touche d’impertinence.

C’est comme ça que j’aimerais présenter Lotta sait tout faire. Petite pépite rapportée de la bibliothèque pour réconforter un soir de « jour sans », trop plein de grisaille et de tensions…

Astrid Lindgren, c’est une très grande dame de la littérature jeunesse… Sa petite Fifi Brindacier est la chouchoute de mes enfants depuis tout petits ! Mais je n’avais jamais lu encore d’autre livre d’elle.

Pour le coup, les enfants ont été plus rapides que moi : cela fait plusieurs semaines déjà qu’ils m’en parlent, à coups de « maman, tu devrais trop le lire… » Une telle unanimité, de 10 à 16 ans, ça interpelle !

Je me suis donc plongée dans Lotta sait tout faire, un soir… C’est un petit recueil de trois histoires, magnifiquement illustrées par le crayon tendre de Beatrice Allemagna… Et j’ai découvert la petite Lotta, presque 5 ans, aux minuscules aventures pleines de vie…

Parce que, comme me l’expliquait doctement mon loulou de 10 ans : « quand tu réfléchis, il ne se passe pas grand chose, en fait… » avant d’ajouter que « pourtant, c’est bien. » Mystère insondable pour ce grand garçon qui aime les aventures trépidantes.

On est plongé dans le quotidien à hauteur d’enfant, avec lapin de Pâques (et sorcières du Jeudi Saint !), excitation du sapin de Noël ou d’une première fois à vélo… avec une petite touche de dépaysement, donc, puisque ce quotidien est celui d’une petite suédoise (et visiblement, les traditions ne sont pas toutes les mêmes là-bas, d’où les sorcières du Jeudi Saint !).

Et c’est délicieux comme un bonbon du samedi…

Pour le feuilleter vous aussi, il suffit de cliquer ici…

À déguster pour les vacances, ou avant, ou après, avec des loulous de tous âges – mes enfants sont « un peu grands » pour ce livre… mais ils se sont régalés quand même ! Et même si ce n’est pas un album, il peut faire une belle histoire du soir pour des « un peu grands »… à la prochaine occasion, je le présenterai à mes petits lecteurs de moyenne ou grande section ! 😉

Les faits et gestes de la famille Papillon – Florence Hinckel

Quel drôle de livre que cette histoire de la famille Papillon ! Vraiment…

Je me suis lancée dedans sans beaucoup hésiter. Il suffit que je sache qu’il était écrit par Florence Hinckel et je plonge les yeux fermés. Yannis (de U4), Le grand saut, et surtout #Bleue qui est l’un de mes livres favoris de tous les temps… J’aime cette manière sensible et juste de décrire les sentiments, les personnages, ces histoires qui font réfléchir…

Autant dire que je n’étais pas préparée à rencontrer la famille Papillon.

Là, on est dans complètement autre chose… Quelque chose de fantaisiste, rigolo, farfelu, coloré, extravagant… exactement comme la couverture.

Nous voici donc embarqués dans la vie de la famille Papillon, et plus précisément celle de Éva Papillon, qui vient de fêter ses 13 ans. Grande fête familiale, comme sa famille farfelue sait si bien les faire… sauf que, le soir, au moment de lui souhaiter une bonne nuit et de lui dire qu’ils l’aiment, son père, sa grand-mère et son arrière-grand-papy lui expliquent qu’elle ne pourra plus jamais quitter leur maison !?

C’est que, dans la famille Papillon, on a un pouvoir assez atypique, que grand-papy Robert va peu à peu lui dévoiler… tandis qu’Éva, qui n’est pas du genre à attendre sans rien faire enfermée dans sa chambre, va chercher à comprendre de son côté.

Oui, parce qu’il faut que je vous dise : le rôle historique de la famille Papillon a été honteusement tu dans les manuels officiels, heureusement que le roman de Florence Hinckel est là pour rétablir enfin la vérité…

Passé la surprise (qui m’a un peu déstabilisée) de ce changement de style, j’ai beaucoup aimé la fantaisie de cette histoire, inventée à partir d’une collection de photos insolites… Certaines sont un peu anecdotiques, d’autres jouent vraiment un rôle dans l’histoire, mais toutes contribuent à ce côté décalé et fantaisiste…

Mais qui est ce mystérieux enfant ? Et à qui appartient cette ombre ?
Cette photo-ci va jouer un rôle important dans l’histoire…

J’ai beaucoup aimé aussi les histoires de grand-papy Robert, savoureuse réécriture d’événements réels plus ou moins connus… Florence Hinckel joue avec les situations, les références… Des clins d’œil que mes deux ados ont bien apprécié aussi.

Même si elle écrit dans un genre très différent, on retrouve la finesse de son écriture, des personnages vivants et réussis… mon coup de cœur va au chien Tchouki qui est vraiment irrésistible ! 😛

C’est un livre qui se lit très vite, et qu’on finit avec un goût de trop peu… le tome 2 est à la bibliothèque, il faut que je me le procure ! Mes deux miss l’ont déjà lu… et attendent avec impatience le tome 3, qui vient de sortir.

Ceci-dit, contrairement aux autres romans de Florence Hinckel que j’ai lu, celui-ci est clairement destiné à des enfants plus jeunes (l’éditeur dit 10-14 ans, je suis assez d’accord avec lui). Certains rebondissements ne sont pas vraiment des surprises pour des yeux d’adulte… mais pas grave, parce qu’on est là pour passer un bon moment, et c’est réussi !

Une dernière anecdote pour la route ?

Les pouvoirs familiaux ont aussi leur face sombre… mais chut… je vous laisse découvrir !

Pour feuilleter les premières pages, sur le site de l’éditeur, c’est ici.

Et pour découvrir (un peu) la collection de photos de Jean-Marie Donat, c’est là.

Coraline – Neil Gaiman (illustré par Aurélie Neyret)

Dans la maison de Neil Gaiman, quand il était petit, il y avait une porte qui ouvrait sur un mur. C’est comme ça qu’il a eu l’idée, des années plus tard, de l’histoire de Coraline.

J’ai lu ça quelque part – je ne sais pas si c’est vrai, mais je l’imagine tellement, cet « enfant sauvage élevé dans une bibliothèque » (c’est comme ça qu’il décrit son enfance) devant cette porte fermée, essayant par la force de son imagination de découvrir ce qui se cache de l’autre côté…

Coraline aussi est une petite fille un peu sauvage, enfin laissée à elle-même pendant que ses parents travaillent sur leur ordinateur. Dans leur nouvelle maison, elle n’a pas grand chose à faire, alors elle explore : la maison, le jardin… et elle découvre cette porte fermée à clef qui ne semble mener nulle part.

Bien sûr, sa maman lui montre : la porte s’ouvre et derrière, c’est un mur. Mais tout de même, pourquoi fermer cette porte à clef ?

… bien sûr, Coraline va franchir la porte, et bien sûr, derrière cette porte, se cache un monde extraordinaire, fabuleux et inquiétant…

Coraline, j’en avais entendu parler, forcément, entre le succès du livre et l’adaptation en film. C’est devenu une sorte de classique de littérature jeunesse. Pourtant, je ne l’avais jamais lu. J’avais des images en tête (l’affiche du film, en fait), j’imaginais un univers à la Tim Burton, mais cela ne m’attirait pas plus que ça.

Ce qui m’a décidé à le lire, c’est la sortie de la très belle version illustrée par Aurélie Neyret. C’est-à-dire que, sans savoir qui était l’illustratrice, j’ai été happée par la couverture… et je me suis dit : « et si je le lisais, finalement, ce livre ? »

C’est vrai qu’il y a quelque chose de Alice au Pays des Merveilles dans Coraline : le monde extraordinaire derrière la porte, la fantaisie des personnages… mais un pays des merveilles maléfique, où il faut se méfier des apparences et où les choses cachent une noirceur qui finit toujours par sortir…

Aurélie Neyret sait à merveille recréer cette ambiance inquiétante, dans les images les plus colorées comme dans les dessins en noir et blanc…

C’est un belle histoire, captivante, qui fait un peu peur (mais pas trop), dans laquelle mes deux grandes miss de 13 et 15 ans ont plongé avec délices… et moi aussi.

Ces yeux remplacés par des boutons, qui m’avaient paru anecdotiques quand j’avais entendu parler du film, sont une vraie trouvaille, qui nous fait passer de quelque chose d’enfantin et presque adorable (la poupée ou l’ours de notre enfance) à quelque chose de soudain inquiétant, et même glaçant…

Entre ces deux mondes erre un chat noir mystérieux, plein de sagesse mais pas toujours bienveillant, étrange, inquiétant ou réconfortant, formidable personnage énigmatique…

On s’étonne avec Coraline, on tremble avec elle, et l’histoire est riche de ces petits détails qui donnent à l’objet le plus banal un pouvoir extraordinaire.

Tout est merveilleusement construit, de bout en bout.

Un classique qui mérite sa place de classique !

À partir de quel âge ? Je me suis posé la question, cherchant des livres pour des CE1/CE2. Et même pour mon grand de CM2. J’ai lu partout que c’était un excellent livre d’horreur à partir de 13 ans… et il y a de ça, incontestablement.

Mais pour les plus grands, c’est vraiment un livre à conseiller, surtout dans cette très belle version illustrée.

À vous de le lire, et de me dire ce que vous en pensez ! Et pour en savoir plus sur l’histoire, je vous laisse écouter cette chronique de France Inter, où une libraire le raconte (mais pas trop) merveilleusement bien… Il suffit de cliquer ici.

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