Mois : janvier 2021

Maarron – Håkon Øvreås

Comment, vous ne connaissez pas Maarron, le superhéros ? Bon, soyons honnête, jusqu’il y a deux semaines, moi non plus.

Enfin, j’en avais entendu parler, je me souvenais d’une série de romans jeunesse écrits par un auteur scandinave, dont on m’avait dit du bien, avec une histoire d’enfants qui devenaient des superhéros et un titre qui rappelait une couleur. (Je vous laisse imaginer la tête de mon libraire préféré quand je lui ai dit que je cherchais ça, avec à peu près ces détails-là… eh bien, croyez-le si vous voulez, mais il me l’a retrouvé, Maarron… après être tombé trois fois sur la page des Maroon 5 !).

Depuis le temps que j’en avais entendu parler, donc, les achats de cette année pour la bibliothèque ont été l’occasion idéale. Parce que ces achats, nous avons dû les faire pendant la fermeture des librairies, et en tant que bénévoles, nous n’avions pas de dérogation pour y aller… le choix s’est donc fait depuis chez nous, sans pouvoir nous réunir, avec des heures de calcul et de discussions… les bons titres qu’on gardait dans un coin, c’était le moment de les sortir !

C’est donc avec un souvenir assez vague que j’ai commencé ma lecture… comme souvent, ce n’était pas tout à fait ce à quoi je m’attendais.

Il y a de l’humour, bien sûr, mais on est surtout dans la sensibilité, l’émotion, les vrais sentiments de l’enfance : les amitiés indéfectibles, les grands qui jouent à embêter, le chagrin qu’on ne sait pas dire, l’imagination qui s’invite dans le réel…

Aaron vient de perdre son grand-père. L’auteur nous le raconte à hauteur d’enfant, quand on ne comprend pas très bien ces choses dont parlent les adultes, et que ce sont les petits détails du quotidien qui ressortent avec intensité…

Tout sonne juste, en fait : la cabane construite avec son copain Norbert, ses conversations avec son amie Claire dont la chambre est couverte de posters de chevaux…

« Tu aimes bien les chevaux ? » demanda Aaron.

« Non, en fait, pas trop. C’est ma sœur qui m’a donné ses posters, elle n’en voulait plus. Elle s’est dit qu’à force de les regarder, je finirais par m’intéresser à l’équitation. »

« Et alors ? Ça marche ? »

« Pour l’instant, j’en sais rien. Je vais essayer encore un mois. »

Son imagination et son ingéniosité pour se venger des terribles garnements qui ont démoli sa cabane.

Et le texte est illustré, avec la même justesse et la même sensibilité…

C’est un petit roman qui se lit très vite. Je l’ai lu d’une traite, et ma miss de 13 ans et mon loulou de 10 ans aussi.

Quand on en a parlé, ils ne m’ont trop rien dit. Pas un coup de cœur pour eux, je crois qu’ils s’attendaient à quelque chose plus dans l’humour ou l’aventure, vu ce que je leur en avais dit. Parce ce que c’est vrai, on est plus dans le récit d’enfance que dans le roman de superhéros !

Mais au moment de venir manger, ou d’éteindre pour se coucher, Maarron a été bien difficile à laisser de côté… donc je pense que je peux continuer à le proposer à la bibliothèque, en parlant plus d’Aaron, et moins de Maarron ?

… et pour lire un extrait, il suffit de cliquer ici (extrait sur le site de l’éditeur).

Neige – Maxence Fermine

C’est un petit bijou de délicatesse, qui parle de poésie, de beauté, de quête d’absolu, de Japon… et de neige, donc.

Un petit bijou comme un conte, en petits chapitres courts, où les phrases condensent leur sens en quelques mots. Un peu comme un haïku.

C’est ma grande qui me l’a fait découvrir. Elle l’étudiait au lycée (dire qu’elle est au lycée, déjà…) et elle m’a dit « tu devrais le lire, ça va te plaire. » Elle me l’a redit (je mets du temps à écouter les bons conseils, parfois), et je le regardais du coin de l’œil, posé sur la table, les pages débordant de post-its.

Puis elle a fini de l’étudier et me l’a conseillé, à nouveau : « tu devrais vraiment le lire. »

Je l’ai posé sur ma table de nuit – j’avais du mal à lire, je finissais mes journées trop chargées trop fatiguée pour suivre les lignes… mais ça me manquait.

La veille de Noël, j’ai eu envie de lire quelques pages, juste avant de dormir. Je l’ai ouvert… c’était parfait. Trois parties : les deux dernières, je les ai gardées pour le soir du 31 décembre, pour bien finir l’année.

C’est un livre beau et doux, et un peu triste, comme un paysage enneigé. La neige est tombée, et je me suis dit qu’il fallait vous en parler aujourd’hui… Partager le conseil.

Pour que vous puissiez vous aussi ouvrir les pages et retrouver un peu de la légèreté et de la poésie des flocons dans le ciel.

Nos frères inattendus – Amin Maalouf

Je ne sais pas si ça vous est déjà arrivé mais parfois, on lit la quatrième de couverture et on a une idée très précise du livre qu’on va lire. On s’imagine l’histoire, on pourrait presque la raconter avant même de l’avoir lue.

C’est un peu ce qui s’est passé quand j’ai commencé à lire la présentation de Nos frères inattendus. J’imaginais tellement bien l’histoire. Sauf que…

Sauf qu’en fait, pas du tout.

J’ai lu les premières pages, et elles n’allaient pas dans la direction que j’imaginais. Le fil de l’histoire s’est réorganisé dans ma tête. Cette fois, je la voyais, la suite…

Sauf que non.

Et ça a continué comme ça pendant toute la lecture. Au bout d’un moment, j’ai lâché prise et je me suis juste laissée porter.

J’ai bien fait.

Si je devais donner un seul mot pour raconter ce livre, ce serait donc celui qui m’avait interpellée dans le titre : inattendu.

C’est un livre qui surprend. C’est un livre qui fait réfléchir. Et c’est un livre qui n’apporte pas toutes les réponses (mais dans le bon sens du terme, parce que j’avoue que je n’aime pas toujours quand la fin n’est pas vraiment une fin).

Mais reprenons au début.

Tout commence au bout du monde ou à peu près, sur une île perdue dans l’Atlantique, loin de tout. Un tout petit bout d’île, le plus petit de l’archipel, relié à la « grande île » par une mince bande de terre, accessible uniquement à marée basse.

C’est là que vit Alexandre, qui nous raconte cette histoire. Il a plutôt l’habitude de s’exprimer avec une plume et de l’encre de chine (il est dessinateur de presse). Mais les circonstances sont exceptionnelles. L’électricité s’est coupée d’un coup (jusque là, rien d’inhabituel), la radio ne capte plus aucun signal, et vu les événements de ces derniers jours, il est évident que quelque chose de grave s’est passé. Il va donc tenir un journal et consigner les faits, grands ou petits, dont il va être témoin.

C’est là que je me suis dit que sur ce petit bout d’île, il ne pourrait pas voir grand chose (et nous non plus). Qu’il s’agirait d’une histoire intime, de relations entre les gens, une remise en question de notre mode de vie moderne, peut-être, pour appeler à plus de simplicité ? Ben non.

Depuis son petit bout d’île, Alexandre va pouvoir tout nous raconter, pour une histoire qu’on n’aurait pas imaginée à l’avance et qui pourrait être un conte philosophique, ou un livre de science-fiction (qu’on rangerait en littérature générale), ou juste une histoire atypique qui s’amuse avec l’Histoire, sur le mode du « et si… »

Pour tout avouer, mes lectures précédentes m’avaient donné un peu de mal (je vous en parlerai pas, du coup 😉 ). Une fois c’était trop difficile à suivre, une autre trop dans la facilité… Là, c’est parfaitement écrit – en même temps, avec un auteur de l’Académie Française… – construit sans être trop littéraire, une forme qui s’efface devant l’histoire.

Ce qui est frustrant, c’est que j’aimerais parler de l’intrigue à quelqu’un, échanger mes impressions, mon avis, mais que mon entourage ne l’a pas encore lu (en même temps, j’avais qu’à le prêter avant… mais je n’ai pas pu me résoudre à ne pas le lire en premier). C’est frustrant de ne pas pouvoir en parler, parce que l’histoire prête à interprétation(s), à échange, ne pose aucune conclusion comme définitive.

Un livre intéressant, déconcertant et donc… inattendu. Je n’ai plus qu’à le prêter autour de moi pour pouvoir en discuter !

PS : j’ai eu la chance que Grasset m’envoie ce livre – partenariat idéal qui me laisse totalement libre de donner mon avis… et encore une fois, une très belle découverte !