Il y a des livres, en bibliothèque, on a du mal à les classer. C’était le cas de L’empreinte, fraîchement arrivé dans nos achats de l’année. Oh, j’en avais entendu parler, beaucoup, en bien, mais j’en gardais un souvenir trop vague, ne l’ayant pas lu…

Est-ce que c’était un roman ? Un policier ? Une histoire autobiographique ? Une enquête sur des faits réels ? Une enquête sur la peine de mort (à mettre en documentaire, rayon société) ? Il avait eu le prix du livre étranger 2019 (pas sûr que ça nous aide beaucoup). Et le prix des lectrices Elle, catégorie Documents (là, c’était sûr, c’est une histoire vraie, non ?).

Après quelques discussions avec mes collègues, quelques recherches sur internet, nous avons décidé de le mettre en « 920 – Biographies ». Pour l’histoire vraie.

Et moi, j’ai décidé de le lire, histoire d’en avoir le cœur net.

J’ai été prise comme par une fiction, une fiction forte… sauf que tout y est vrai.

L’empreinte, ce sont deux histoires (et même un peu plus) qui se rencontrent. Un fait divers, comme on dit : le meurtre d’un petit garçon de six ans, par un pédophile. Ce fait divers heurte la vie d’Alexandria Marzano-Lesnevich, étudiante en droit, alors qu’elle commence son stage de première année dans un cabinet d’avocat spécialisé dans la peine de mort.

Et ce jour-là, ce sont des histoires multiples qui se collisionnent : celle de Ricky Langley, condamné pour ce meurtre qu’il a avoué, qui attend son procès d’appel. Celle de Jérémy, le petit garçon qu’il a tué. Celle d’Alexandria, dont le passé résonne avec cette histoire, qui veut comprendre. Celles aussi de Lorilei, la mère de Jérémy. Celle des parents de Ricky, de sa famille. Celle de Terry, Pearl, chez qui Ricky habite. Celle des policiers qui mènent l’enquête, celle du juge, des jurés…

Alex Marzano-Lesnevich démêle tous ces fils, à moins qu’elle ne les tisse entre eux, pour chercher un sens qu’on ne peut jamais cerner tout à fait. Elle fait revivre tous ces personnages, à travers une foule de petits détails réinventés : les motifs d’une robe, l’odeur de l’herbe coupée… Elle nous entraîne dans un récit incroyablement bien construit, dur parfois, forcément, où tout sonne vrai comme dans un roman mais où, comme dans la réalité, on n’obtient pas toujours toutes les réponses.

Elle nous entraîne dans ce récit nourri de fiction mais d’une rigueur absolue, où un « peut-être », ou un « je l’imagine ce jour-là » marquent discrètement la frontière de ce qui a été « réinventé ».

Ses personnages ne révèlent jamais tout à fait leurs secrets, on a l’impression de les connaître, pourtant, on découvre combien même les « monstres » ont plusieurs facettes, que rien n’est jamais simple…

À la fin, rien n’est complètement résolu mais les choses arrivent tout de même à une conclusion – cette forme de conclusion qui permet de continuer à vivre, de se dire qu’on n’a pas fait « le tour de la question » (on ne le fera jamais) mais qu’on a remis les choses assez en ordre pour aller de l’avant…

C’est un beau livre, difficile, très bien traduit aussi dans un français agréable à lire. Pas un livre léger pour se détendre, c’est sûr, mais un livre à lire, sûrement aussi…