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Janvier féministe #2 – Le féminisme, par Anne-Charlotte Husson, Thomas Mathieu

Alors oui, je sais, nous sommes en février, alors « Janvier féministe »… mais euh, ma thématique de janvier, j’aurais envie de la continuer un peu… alors, par la magie des « on dirait que », commençons par « on dirait que le janvier féministe pourrait aussi se faire en février… » (pouvoir de l’imagination)

Cette deuxième lecture féministe de janvier, c’est ma fille qui me l’a faite découvrir… c’est le cadeau d’une de ses amies qui est la fille d’une de mes amies… une histoire filles (et d’amatrices de BD).

A priori positif immédiat, parce que c’est un tome de l’excellente collection La Petite Bédéthèque des Savoirs, dont le seul défaut est d’être dans un format vraiment petit (les illustrations mériteraient de plus grandes pages !). Le féminisme est l’un de leurs plus grands succès (signe des temps, comme je le disais en chroniquant ma lecture précédente…).

Ici, on ne va pas nous parler du féminisme mais plutôt des féminismes. Parce que loin d’être un mouvement uniforme, on a plutôt une mosaïque de mouvements, différents et parfois irréconciliables… Petit extrait, pour comprendre tout ça…

Petite remarque de forme : pour le coup, ce titre de la collection est totalement adapté à son format… très lisible, on plonge tout de suite dedans. Le dessinateur a vraiment fait un très beau travail pour rendre toutes les notions claires et visuelles…

Comme l’expliquent très bien les premières pages, on va découvrir les féminismes à travers des slogans… chacun permettant de découvrir un personnage, une idée, un mouvement… à travers les siècles, en en commençant par une féministe célèbre, Olympe de Gouges (rappelez-moi de lire sa biographie en BD par Catel, elle a l’air tellement super…).

(ma fille est fan de cette manière de la représenter qui défend ses convictions
même après la guillotine ! 😛 )

J’aurais pu vous mettre aussi « le privé est politique » ou « ne me libère pas, je m’en charge »… ou encore « White woman listen ! »

Tous les sujets sont abordés : féminicide, IVG, intersectionnalité… c’est donc un livre pour adultes ou pour grands ados qui ont envie de réfléchir. Il peut être une formidable ouverture pour un dialogue, même si (et peut-être surtout si) on ne se retrouve pas dans tous ces mouvements féministes.

Parce que c’est la diversité qui fait la richesse de cette petite BD, à mon sens – présentée d’entrée, elle laisse à chacun la possibilité de se faire ses propres opinions. Même si les auteurs ne restent pas sur la réserve – la notion de « continuité de genres et de sexualités » est ainsi présentée comme une évidence alors que pour ce sujet ô combien délicat, j’aurais préféré que le livre ouvre davantage à un échange, une réflexion (personnelle ou, plutôt, collective).

Quoi qu’il en soit, on sent bien combien ce sujet brûlant doit être abordé, pour lutter contre tous les préjugés, les haines, les discriminations et les petites et grandes humiliations ordinaires…

Comme le dit si bien une petite publication du Goethe Institut, parue elle aussi ces derniers jours… « Nein zu Diskriminierungen ! »

(petite dédicace à ma miss qui parle si bien allemand… mais les non germanistes auront décodé : non aux discriminations !)

Pour poursuivre, ou faire naître le dialogue, l’éditeur propose une exposition qui reprend des slogans et planches de la BD et finit par deux grandes pages à compléter avec ses propres idées… et vous pourrez aussi y découvrir les premières pages de la BD, et avoir (forcément) envie d’en lire plus !

Janvier féministe #1 – Les Grandes Oubliées, de Titiou Lecoq

Hasard ou coïncidence… mes premières lectures de cette année sont assez féministes ! Pas tout à fait le hasard, en fait, parce que d’abord, c’est une tendance forte en librairie, et aussi parce que ces livres m’ont été recommandés par des amies…

Féministe, moi ? Peut-être… il faut dire que j’ai exercé plusieurs métiers, mais en commençant par des études scientifiques (avec beaucoup de garçons) et des métiers « dits masculins » – avec leur lot de réflexions de collègues du type « normalement, les filles ne font pas d’informatique… mais toi, c’est pas pareil » – euh… mais que voulait-il dire par là ??? En même temps, avec aussi beaucoup de camaraderie, d’entraide, de belles rencontres et beaucoup de témoignages du type « j’étais contre les femmes dans l’armée mais elles m’ont fait changer d’avis » (oui, ma vie est un roman…).

Bref, c’est un sujet qui m’a toujours beaucoup intéressée…

Il n’est donc pas surprenant que l’une de mes copines bibliothécaires (un monde avec beaucoup de filles, pour le coup) m’ait conseillé Les Grandes Oubliées, pourquoi l’Histoire a effacé les femmes.

Je l’ai lu… deux fois (on ne se moque pas de mon cerveau défaillant le soir, qui ne me faisait confondre toutes les époques après la première lecture… alors que ce livre se lit comme un roman !). Et ce livre est plein de choses complètement passionnantes.

Titiou Lecoq nous entraîne ainsi depuis la préhistoire et jusqu’à aujourd’hui, pour découvrir l’Histoire côté femmes. Et découvrir en quoi notre vision de l’Histoire est empreinte de stéréotypes, de réécritures…

Par exemple, vous avez déjà entendu, vous aussi, des « experts » expliquer que les femmes n’ont pas le sens de l’orientation, contrairement aux hommes, parce qu’elles restaient dans la grotte pendant la préhistoire ? … j’ai lu ça dans Les hommes viennent de Mars, et j’avoue que ça m’avait pas mal agacée – du coup, j’en étais restée là de ma lecture. Eh bien, cette histoire de femme qui reste dans sa grotte, c’est n’importe quoi (en même temps, on se demande ce qu’elle y aurait fait, toute la journée… le ménage et la poussière ?). Non seulement les femmes faisaient des kilomètres pour la cueillette, mais elles participaient aussi à la chasse – pas partout de la même manière parce que, autre stéréotype qui tombe, il n’y a pas eu une culture partout dans le monde durant toute la préhistoire…

Autre exemple, le Moyen-Âge. On découvre que les femmes y faisaient tous les métiers, et qu’il y avait donc des mots pour ces métiers, comme le mot autrice – moi qui croyais que c’était un néologisme, auquel j’étais un peu allergique… Titiou Lecoq m’a réconcilié avec ce mot.

On découvre surtout que l’Histoire des femmes n’a pas été linéaire… des périodes « de renfermement » succèdent aux périodes « d’ouverture », et le modèle qu’on a tous en tête comme existant depuis la nuit des temps (un partage des tâches où l’homme travaille à l’extérieur et la femme assume les tâches domestiques et l’éducation des enfants) ne date en fait que du XIXème siècle.

Et c’est au XIXème siècle qu’on commence à étudier la préhistoire, en y projetant sa vision du monde… d’où la femme qui fait le ménage dans la grotte (la boucle est bouclée 😉 ).

J’ai tout de même une réserve. Comme dans beaucoup de livres sur le sujet, l’autrice (oui oui, mot adopté !) regarde tout à travers le prisme de la place des hommes et des femmes – un prisme qui ne rend pas toujours compte de la complexité du monde. Qu’un couple fasse une déclaration d’impôt commune, j’ai toujours vécu ça comme le fait de faire partie d’une équipe, pas comme une discrimination (si le salaire de la femme est souvent inférieur à celui de son mari, les dépenses sont assumées en commun aussi…). On pourrait s’interroger sur l’existence et la reconnaissance de chacun dans la famille… mais ça demande un autre prisme. 😉

Même si je n’étais pas d’accord avec tout, c’est un livre qui fait se poser des questions, qui remet en cause des acquis… un livre très bien écrit, plein d’humour, où les chapitres s’enchaînent, qui assume son côté militant. Une bonne manière de commencer l’année !