Quatre idiots en Syrie – Christophe Donner

Si vous aimez les situations absurdes et l’humour caustique, ce livre est fait pour vous. Enfin, quand je dis absurde… je devrais plutôt dire ubuesque, ou abracadabrantesques. Parce qu’il faut au moins le mot abracadabrantesque pour raconter ce périple de deux écrivains, un cinéaste et un photographe dans l’un des pays les plus fermés aux occidentaux…

Tellement abracadabrantesque donc (ce mot est un enfer à taper !) que j’ai eu un doute : est-ce que Christophe Donner ne nous menait pas un peu en bateau ? Est-ce que toute cette histoire était vraie ? J’ai fureté un peu sur internet et j’ai dû me rentre à l’évidence : Adnan Azzam n’est pas un personnage de fiction, aussi incroyable que cela puisse paraître. J’ai retrouvé une grande partie des vidéos dont l’auteur parle (à part celle avec les gilets jaunes et là, j’avoue que je regrette…).

C’est donc l’histoire de quatre personnes qui partent en Syrie. Ils ont été invités pour rencontrer des personnalités du régime, à l’occasion du Festival du Cheval de Damas. Christophe Donner (auteur de livres jeunesse, voilà donc pourquoi son nom m’était familier !) fait partie du voyage, malheureusement sans son épouse qui parle arabe et aurait pu lui traduire bien des choses. Sans personne qui parle arabe, d’ailleurs. Mais leur hôte, Adnan Azzam, est sur tous les fronts, traduit pour eux (merveilleuses séquences de traductions, retranscrites après coup par la femme de Christophe Donner, où il fait preuve d’une imagination et d’une créativité peu égalées dans le domaine de la traduction). Et il est bien décidé à leur montrer que la Syrie, ce n’est pas du tout comme les occidentaux l’imaginent. Et Bachar el-Assad non plus.

Nos quatre compères ne vont pas rencontrer Bachar, ni peut-être d’ailleurs de hauts personnages du régime – en fait, qui sont les personnages à qui on les présente ? ce n’est jamais très clair, mais après tout, est-ce vraiment important, du moment qu’on fait comme si ?

Et surtout, de demi-vérités en demi-mensonges, ils vont être entraînés à jouer un rôle pas franchement prévu au départ.

Christophe Donner y promène partout un regard un peu moqueur et plutôt acerbe, pas dupe mais embarqué malgré tout… On ne parlera pas de guerre ou de terrorisme ou de grand enjeu politique, plutôt de la grande comédie que peuvent devenir certaines dictatures – dont on sait, l’auteur le premier, qu’elle dissimule aussi les réalités les plus cruelles. Mais se moquer, est-ce que ce n’est pas aussi une forme de résistance ?

J’ai beaucoup aimé ce livre, pour cette lucidité, ce détachement et cet humour. Il faut que je le fasse lire à mon mari, tiens – bon, je vous avoue tout, je l’avais un peu planqué pour qu’il ne le lise pas en premier… mais en même temps, c’est qui la blogueuse, ici ?

En attendant la réouverture des librairies, vous pouvez le découvrir en numérique (références sur le site de l’éditeur). Avec les toutes premières pages mais pour une fois, je trouve que c’est trop peu pour se faire une idée du livre… Il faudrait pouvoir le feuilleter en vrai. Vivement la réouverture des librairies…

PS : à nouveau, il s’agit d’un partenariat avec Grasset – je ne sais pas comment ils choisissent leurs livres, mais ça fait mouche à chaque fois ! En tout cas, le deal est toujours le même : je vous donne mon avis comme si je l’avais acheté moi-même. 😉

2 Comments

  1. Marie

    Mazette ….
    Un certain courage peut-être aussi de dévoiler à la face du monde avoir manqué de discernement en acceptant l’ « invitation » …

    • anne(tte)

      Du courage certainement, et un peu d’esprit de rébellion. Mais il est clair qu’il s’est posé la question de comment se sortir de cette « invitation » sans se faire utiliser…
      En tout cas, j’aime beaucoup la manière dont il raconte tout ça. 😉

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